Je chasse la gélinotte huppée depuis l’âge de 12 ans, soit depuis plus de 40 ans. À cette époque, l’apprentissage d’un nouvel adepte débutait inévitablement par la chasse de ce splendide oiseau. Présent presque partout au Québec, il était donc assez facile de faire récolter quelques spécimens à un jeunot n’ayant aucune expérience. Étant natif de la Gaspésie, mes premières années de chasse à la gélinotte furent assez faciles. Celles-ci étaient abondantes et peu farouches. Je récoltais ainsi ma part d’oiseaux sans trop me poser de questions. C’est lorsque je suis déménagé dans la région de Québec et que je me suis mis à chasser des secteurs moins giboyeux qu’en Gaspésie que je me suis rendu compte que la partie ne serait pas toujours aussi facile. J’ai compris alors qu’il faudrait que je sois fin observateur pour découvrir les moindres petits détails qui me serviraient à tirer mon épingle du jeu car en plus d’être moins nombreuses, les gélinottes étaient plus farouches, ce qui compliquait leur récolte.
Ce dernier point me permit par contre de constater des choses toute simples. En effet, même si je manquais une gélinotte lors d’une sortie en forêt, cela ne voulait pas dire que cet oiseau quittait le secteur, bien au contraire. Très souvent le lendemain ou le week-end suivant, je pouvais obtenir une seconde chance de la récolter. J’ai appris plus tard en me documentant que la gélinotte huppée occupe un espace vital très restreint tout au long de sa vie (pas plus de 100 ha) et que dans cet espace restreint, elle affectionne des endroits bien précis. Il faut comprendre que cet oiseau n’est pas très intelligent et qu’il n’associe pas un danger à un lieu précis. Certes, une gélinotte constamment dérangée par des prédateurs deviendra plus nerveuse et donc plus farouche qu’une autre qui n’a pas à subir cette pression.
Mais, cela ne l’incitera pas à déménager ses pénates ailleurs. Fort de ce constat, j’ai commencé à noter précisément où je levais des perdrix, sachant fort bien que cet endroit abritait quelques spécimens. De plus, j’ai pris l’habitude d’analyser ces secteurs pour comprendre pourquoi une ou des gélinottes se trouvaient à ces endroits. Ainsi, en scrutant attentivement les lieux, je découvrais soit des arbres fruitiers, un petit ruisseau, un arbre renversé où un mâle pouvait tambouriner, un petit éclairci en forêt, etc. Ces découvertes venaient ainsi me confirmer que ces rencontres n’étaient pas le fruit du hasard et que même si j’avais récolté un oiseau dans un secteur, ce dernier risquait fort bien d’en abriter un ou plusieurs autres la semaine ou la saison suivante. Lorsqu’on commence à noter de telles observations, il est important d’inscrire le plus d’informations possible comme la date, l’heure de l’observation ainsi que les conditions météorologiques du moment. De cette façon, on peut noter des tendances de fréquentation des gélinottes huppées sur un territoire précis. Ces données peuvent par la suite être enregistrées dans votre GPS et vous pouvez ainsi créer un parcours qui vous fera passer d’un secteur propice à un autre. Ça fait maintenant plusieurs années que je fonctionne ainsi et je dois avouer humblement que je réussis à récolter mon lot d’oiseaux annuellement et ce, dans des secteurs qui n’abrite pas nécessairement des quantités importantes de gélinottes.